Chapitre 2 – Des cours de combat :

Je suis Luff au-dehors, dans la rue étroite inondée par la lumière du soleil haut. La petite ruelle débouche sur une large route pavée, bordée d'échoppes et de maisons. Luff me conduit dans un petit bâtiment délabré qui donne sur une grande cour où plusieurs personnes combattent déjà. Mon nouvel et premier ami s'approche d'un vieux nain en train de combattre un jeune homme brun. En nous voyant, le nain dit :

- Bon, c'est bon, Matthieu, tu t'es bien amusé ? On peut arrêter maintenant ?

Et il fait un mouvement de l'épée presque indistinct qui fait voler l'arme de son adversaire. Le jeune homme, haletant, va chercher son arme pendant que Luff s'approche du gagnant :

- Bonjour Kohort, dit-il. Comment vas-tu ?
- Bonjour Luff. Je perds un peu ma forme, mais apparemment aucun de mes adversaires ne s'en rend compte.
- Je t'apporte un nouveau disciple.

Et il se recule, comme pour me laisser la place, même si Kohort avait dû me voir depuis longtemps, vu ma taille et celle de mon camarade. Pourtant, Kohort semble me découvrir et ouvre des yeux ronds comme des soucoupes. Il recule d'un pas et prend une position étrange. Je n'arrive pas à savoir si cette nouvelle position est plus détendue ou plus tendue. Luff y voit visiblement un danger, car il se repositionne entre nous, les bras ouverts, et lance :

- Attends ! Elle n'est pas méchante !
- Qu'est-ce que tu en sais ? J'ai déjà combattu des bestioles comme ça, ça fait des dégâts, je peux te l'assurer ! Pourquoi tu l'as ramenée dans mon club ?
- Elle est gentille ! Je t'assure !
- Si tu la trouves gentille, c'est parce que tu as autant de jugeote qu'un ver de métal !
- Mais non ! Elle n'est pas dangereuse, je te dis ! Parle-lui, tu verras !
- Parler à une langue fourchue comme elle ? Jamais de la vie !
- Mais tu ne la connais pas !
- Ah, parce que toi, tu la connais, peut-être ? C'est une tieffeline, bon sang ! Luff, ouvre les yeux !
- S'il te plaît, Kohort, j'ai besoin que tu fasses d'elle une combattante ! J'en ai besoin pour ma mission !
- Pour qu'elle me poignarde dans le dos dès que je lui aurais appris à tenir correctement une arme ? Jamais de la vie, je te dis !
- Arrête de dire des bêtises ! Tu es plus rapide que n'importe qui ici !
- On voit que tu n'as jamais combattu des choses comme ça ! Ces bêtes-là, ça a le combat dans le sang !
- Mais essaie, au moins, Kohort ! S'il te plaît ! Pour moi ! Pour ce que tu me dois !

Le nain grommelle dans sa longue barbe tressée et s'approche de moi, quoique toujours méfiant.

- Bonjour monsieur, dis-je timidement. Monsieur ?
- Monsieur Tapfort.
- Euh... je peux vous appeler Kohort ?
- On verra.

Il me lance un bâton long d'environ un mètre et en prend un de la même taille. Je prends une pose approximative et attends. Kohort me jauge du regard et tente un coup droit vers mon ventre. Je brandis mon bâton dans un réflexe et ferme les yeux. Mon bout de bois heurte l'autre avec violence et fais vibrer mon bras jusqu'à mon épaule. Kohort recule d'un bond, comme si j'étais explosive.

- Tu vois ? rugit-il à l'adresse de Luff. Je te l'avais dit ! Un débutant ne peut pas réussir un coup pareil, avec autant de puissance, et en fermant les yeux qui plus est !
- Eh bien, justement, elle a fait une erreur, non ? Elle a fermé les yeux, tente Luff.
- Bon, je veux bien continuer, mais au premier geste suspect, j'arrête ou j'attaque vraiment !
- D'accord, fait Luff.

Et Kohort se retourne vers moi, sourcils froncés. Il attend quelques secondes puis attaque sur le côté. Je recule d'un bond, et le bout de son bâton m'érafle à peine le ventre. Puis je contre-attaque avec un coup du haut vers le bas. Mon bras retient un peu le coup, de peur de voir Kohort s'énerver, et il a largement le temps d'esquiver.

- Qu'est-ce que c'est que ce coup pourri ? Tu ne te sers pas d'un marteau !

L'entraînement continue longtemps, avec des coups de plus en plus violents de ma part et avec de plus en plus de remarques de la part de Kohort, qui s'enthousiasme visiblement au fil des coups.